Les complications du décollement postérieur du vitré

Revue de la presse de février 2022

Auteurs : Jean-Rémi Fénolland, Antoine Rousseau
Coordination : Marc Labetoulle

Revues sélectionnées :
Ophthalmology, JAMA Ophthalmology, IOVS, Progress in Retinal and Eye Research, Current Opinion in Ophthalmology, Survey of Ophthalmology, Journal of Cataract and Refractive Surgery, American Journal of Ophthalmology, British Journal of Ophthalmology, Retina, Cornea, Nature, Lancet, NEJM, Science.


Les complications du décollement postérieur du vitré

Le décollement postérieur du vitré (DPV) est un événement critique car il peut se compliquer de déhiscence rétinienne et parfois de décollement de rétine. Une publication de la revue Ophthalmology du mois de janvier a retenu notre attention car elle permet de bien caractériser la survenue de ces complications en s’appuyant sur des données de masse.
 

Seider et al ont utilisé les données informatisées d’un système de santé du nord de la Californie qui concerne une population de 4 millions d’habitants. Ils ont extrait les données de l’année calendaire 2018 afin de recenser les décollements postérieurs du vitré nouvellement diagnostiqués, d’en calculer l’incidence de leurs complications et leurs facteurs de risque.
 

Un total de 8305 patients qui avaient présenté un DPV ont été identifiés. L’âge moyen de survenue du DPV symptomatique était de 63,8 ans (extrêmes de 36 à 90 ans). Les femmes représentaient 61,2% de la cohorte et leur âge moyen à la survenue du DPV était de 64,7 ans contre 63,1 ans chez les hommes. Au niveau de la symptomatologie, 94,6% des patients rapportaient l’apparition de myodésopsies et 44,9% des phosphènes. La plupart des patients avaient été examinés par un ophtalmologiste (83,6%) et 16,4% un optométriste. L’examen initial a relevé une déhiscence rétinienne chez 448 patients soit une incidence de 5,4%. Un décollement de rétine  a été diagnostiqué chez 335 patients soit une incidence de 4%. La moitié des patients avec un tableau de décollement de rétine décrivaient un scotome périphérique (n=152 ; 51,3%).

Une analyse multivariée a permis de souligner les facteurs de risque de DPV compliqué, autant d’informations utiles au triage des patients dès l’interrogatoire. Une baisse d’acuité visuelle, des antécédents familiaux de décollement de rétine, un âge inférieur à 60 ans, un antécédent chirurgical ophtalmologique (chirurgie de cataracte ou réfractive), ou encore des symptômes de survenue récente de moins de 7 jours étaient associés à une complication plus fréquente du DPV. A l’inverse, la présence de phosphènes, dans cette série, apparaissaient associés à un risque inférieur de survenue de complications rétiniennes avec un risque relatif calculé à 0,8. Toujours en analyse multivariés, les signes à l’examen clinique associés à un DPV compliqué comprenaient la présence de pigment dans la cavité vitréenne (connu également sous le terme de tobacco dust ou signe de Shafer), une hémorragie intravitréenne, une hémorragie rétinienne, la présence d’une dégénérescence palissadique, ainsi qu’une acuité visuelle à moins de 5/10ème. L’analyse du lien avec la réfraction ne portait que sur 7362 patients pour lesquels le dossier médical comportait les données adéquates : la myopie était associée à un risque plus élevé de complications alors que l’hypermétropie supérieure à +1 dioptrie était protectrice. Les auteurs soulignaient également la précocité du DPV chez les myopes forts de moins de -6 dioptries avec un âge moyen de survenue de 58,2 ans, contre 65,1 ans chez les emmétropes (réfraction comprise entre +1 et -1 dioptrie). Le DPV survenait encore plus tardivement chez les hypermétropes de plus de +1 dioptrie avec un âge moyen de 69,2ans. Une des forces de cette étude est également le suivi des DPV apparemment simples et qui concernaient 90,6% des patients. Sur les 7522 patients concernés et suivis pendant au moins un an, un total de 133 patients (1,8%) ont finalement développer une déhiscence rétinienne et 75 un décollement de rétine (0,9%) avec un délai de survenue moyen de respectivement 22 et 58,1 jours. Le facteur anatomique de risque de survenue d’une complication tardive en absence de déhiscence ou de décollement de rétine initialement était une hémorragie intravitréenne avec un risque majoré par un facteur 17, la dégénérescence palissadique (x8) et un antécédent de décollement de rétine de l’œil adelphe (x5). Les patients qui associaient 3 facteurs de risque avaient, au total, un risque de 12,4% de complication rétinienne à un an, contre 0,7% en l’absence de facteur de risque.
 

Cette étude confirme bien la nécessité de réexaminer les patients qui présentent un DPV aigu sans déhiscence ni décollement de rétine quelques semaines après le diagnostic initial, période cruciale au cours de laquelle apparaissent le plus souvent les complications rétiniennes. Elle permet également de mettre en exergue les facteurs de risque de complications à bien connaître afin d’accompagner au mieux cet événement lié à la synérèse vitréenne.
 

Seider MI, Conell C, Melles RB. Complications of Acute Posterior Vitreous Detachment. Ophthalmology. 2022 Jan;129(1):67-72.

Reviewer : Jean-Rémi Fénolland

Thématique : Rétine